Skip to main content

Journée nationale de la Résistance

SAMEDI 27 MAI 2023 : événement organisé par la SFAADIR au Ministère de l’égalité entre les femmes et les hommes à l’occasion de la Journée nationale de la Résistance.

Cet événement a permis à des élèves du collège d’Épinay-sous-Sénart, réunis à l’initiative d’Isabelle Rome, ministre de l’égalité entre les femmes et les hommes, d’entendre le témoignage de Jacqueline Fleury, présidente d’honneur, et de partager avec des membre de la SFAADIR des lectures de textes écrits par des résistantes déportées à Ravensbrück.

DÉROULÉ DE LA CÉRÉMONIE

Accueil et propos introductifs de Mme Isabelle Rome, ministre déléguée à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la diversité et à l’égalité des chances

Lectures de textes par des élèves sur l’engagement des femmes dans la résistance :

– Jacqueline Fleury, extrait de Résistante (2019) : « nous n’avions pas les mêmes droits que les hommes »

– Marie-José Chombard de Lauwe, extrait de Toute une vie de résistance (2013) : « une résistante à vie »

Représentation par les élèves d’un extrait de la pièce Anne Franck, représentée par les élèves au Mémorial de la Shoah en mars 2023

Lecture de deux textes sur la déportation à Ravensbrück

– Poème de Catherine Roux (« Mon Dieu ») extrait du Recueil Triangle rouge (1946)

– Poème de Micheline Maurel (« Il faudra que je me souvienne ») extrait du recueil La passion selon Ravensbrück – poème écrits au camp (1965)

LECTURES DE TEXTES

1. JACQUELINE FLEURY Extrait de Résistante, de Jacqueline Fleury et Jérôme Cordelier (2019).

« Chaque nuit, je vois vos visages. Chaque nuit, j’entends vos voix. Chaque nuit, je vous sens, là, près de moi. Yvonne, Germaine, Geneviève, Andrée, Marguerite… Mes sœurs de combat, mes compagnes des ténèbres, vous n’êtes plus de ce monde, mais vous m’accompagnez, à tour de rôle. Comme toi, maman, qui es toujours à mes côtés, chaque minute qui passe et me rapproche de toi.

« Que diraient mes six petites-filles, mes sept arrière-petites-filles si elles vous voyaient comme je vous vois, si elles vous entendaient comme je vous entends ? Elles qui pénètrent de plain-pied dans ce XXIe siècle dans lequel les luttes des femmes occupent une place majeure… Se souviendront‑elles que lorsque nous sommes entrées dans la Résistance contre l’occupant nazi, nous n’avions pas le droit de vote ‑ nous ne l’obtiendrons qu’en 1944 ‑ ni même la possibilité d’ouvrir un compte en banque sans l’autorisation de notre conjoint ‑ nous ne le pourrons qu’en 1965 ?… Nous nous sommes engagées pour la liberté, nous avons été déportées dans les camps pour cela, et nous n’avions pas les mêmes droits que les hommes… »

2. MARIE-JOSÉ CHOMBARD DE LAUWE – Extrait de Toute une vie de Résistance (2013)

« Trois années d’internement et de déportation vont conduire la jeune fille passionnée, patriote que j’étais, à qui ses parents avaient enseigné le respect de tout être humain et le dévouement à ceux qui souffrent, dans l’univers nazi du « mal absolu », qui détruisait l’humanité dans l’être humain.
Déjà, sous l’Occupation, j’avais découvert les conséquences dramatiques de l’abolition des principes de la République française qui, jusqu’alors, me semblaient incontestables bien que souvent mal respectés. Nous avions perdu notre liberté dans la vie quotidienne, beaucoup d’hommes étaient prisonniers de guerre, les premières discriminations raciales commençaient. Les occupants nous humiliaient à de multiples occasions.
C’est pourquoi dans les Côtes d’Armor, avec d’autres lycéens j’ai commencé par de petits gestes, comme d’inscrire des croix de Lorraine sur les murs. Puis ce fut avec mes parents et tout un groupe de résistants la création d’un réseau d’évasion et de renseignements.
Arrêtée le 22 mai 1942, j’abordais une phase de ma vie qui fera de moi à la fois un témoin des crimes contre l’humanité perpétrés par les nazis et une « résistante à vie », comme beaucoup de mes camarades de prison et de camp. Je voudrais aussi demeurer un porte-parole de ceux qui ne sont pas rentrés et dont je garde le souvenir. »

3. CATHERINE ROUX – poème extrait du recueil Triangle rouge (1946)

Mon Dieu
« Mon Dieu, je n’ai plus de vêtements sur moi,
je n’ai plus de chaussures,
je n’ai plus de sac, plus de portefeuille, de stylo,
je n’ai plus de nom. On m’a étiquetée 35282.
Je n’ai plus de cheveux, je n’ai plus de mouchoir,
je n’ai plus les photos de Maman et de mes neveux.
Je n’ai plus l’anthologie où chaque jour
dans ma cellule de Fresnes
j’apprenais la poésie.
Je n’ai plus rien.
Mon crâne, mon corps, mes mains sont nus. »

4. MICHELINE MAUREL – Il faudra que je me souvienne, extrait du recueil La passion selon Ravensbrück, poèmes écrits au camp (publié en 1965)

« Il faudra que je me souvienne
Plus tard, de ces horribles temps
Froidement, gravement, sans haine,
Mais avec franchise pourtant.
De ce triste et laid paysage
Du vol incessant des corbeaux,
Des longs blocks sur ce marécage,
Froids et noirs comme des tombeaux.
De ces femmes emmitouflées
De vieux papiers et de chiffons
De ces pauvres jambes gelées
Qui dansent dans l’appel trop long.
De cette toux, à perdre haleine,
De ce regard désespéré
Tourné vers la terre lointaine,
Mon Dieu, faites-nous rentrer.
Il faudra que je me souvienne… »

ÉLÉMENTS DE BIOGRAPHIE

JACQUELINE MARIÉ-FLEURY est née le 12 décembre 1923 à Wiesbaden, en Allemagne. Son père est officier de carrière. Sa famille maternelle, originaire du Soissonnais, a été durement éprouvée par la Première Guerre mondiale.
Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, Jacqueline Marié termine ses études secondaires. En 1940, la famille entière entre en Résistance. Jacqueline Marié s’engage dans le mouvement Défense de la France, qui crée et diffuse un journal clandestin. Ce mouvement s’organise autour de Philippe et Hélène Viannay et compte parmi ses membres Geneviève de Gaulle. Jacqueline Marié transporte et distribue le journal à Versailles, où elle habite, et dans ses environs. Son frère est membre du réseau de renseignements Mithridate ; il parvient avec l’aide de Jacqueline, qui appartient au même réseau, à communiquer à Londres des plans du Mur de l’Atlantique.
Jacqueline Marié est arrêtée, avec ses parents, le 29 juin 1944. Ils sont incarcérés à la prison de Fresnes, d’où ils sont déportés le 15 août 1944 (son père, à Buchenwald ; Jacqueline et sa mère, à Ravensbrück).
Jacqueline Marié et sa mère sont contraintes aux « marches de la mort » du 13 avril au 9 mai 1945. Après des jours de marche forcée, elles s’évadent ; des prisonniers de guerre français leur portent secours.
En 1946, Jacqueline Marié épouse Guy Fleury. En 1958, elle est décorée de la Légion d’Honneur. Elle est titulaire de la Croix de Guerre avec palme, de la Croix du Combattant Volontaire 1939-1945 et de la Croix du Combattant Volontaire de la Résistance. Jacqueline Fleury-Marié, également Grand-croix de l’Ordre national du Mérite et Commandeur des Palmes académiques, a été élevée en 2019 au rang de Grand-Croix de la Légion d’honneur.
Jacqueline Fleury-Marié a joué un rôle actif dans le Concours national de la Résistance qu’elle a créé avec des déportés résistants dans les années 1960. À ce titre, elle a effectué de très nombreuses interventions dans les collèges et lycées pour transmettre la mémoire de la Résistance et de la Déportation.
Son livre de témoignage, Résistante, publié chez Calmann-Lévy en 2019 avec Jérôme Cordelier, a reçu une mention spéciale dans le cadre du Prix littéraire du Souvenir français qui distingue chaque année des ouvrages consacrés à la Résistance.
Jacqueline Fleury-Marié a succédé en 2002 à Geneviève Anthonioz de Gaulle à la présidence de l’ADIR (Association nationale des anciennes déportées et internées de la Résistance), qu’elle a présidée jusqu’en 2006. Elle est aujourd’hui présidente d’honneur de la SFAADIR (Société des familles et amis des anciennes déportées et internées de la résistance).

Née en 1923, MARIE JOSÉ WILBORTS /CHOMBARD DE LAUWE participe à la Résistance dans les Côtes d’Armor, dès le début de l’Occupation, à dix-sept ans, alors qu’elle est en classe de terminale. Elle contribue avec ses parents et un groupe d’amis, dans un mouvement portant le nom de « La bande à Sidonie », aux évasions vers l’Angleterre. Le groupe est intégré en 1941 au réseau de renseignement « Georges France 31 ». Marie-José, qui commence ses études de médecine à Rennes, possède un Ausweis, ou laisser-passer, qui lui permet de se rendre sur la côte, alors zone interdite, ses parents y étant domiciliés. Elle est alors chargée de ramener aux responsables du réseau les documents sur les défenses côtières collectés par les résistants, bien cachés dans ses cahiers. Le 22 mai 1942, les responsables du réseau sont arrêtés à Rennes ; dénoncés par un agent double, Marie-José, ses parents et onze membres du réseau sont arrêtés par la Gestapo. Elle a alors dix-neuf ans.
De la prison de Rennes, elle est transférée à la prison d’Angers où sa mère est également enfermée, puis à la prison de la Santé où sont alors internées Marie-Claude Vaillant-Couturier et France Bloch-Sérazin, et enfin, à Fresnes. En juillet 1943, elle est déportée à Ravensbrück. Elle occupe, avec ses compagnes de convoi, le bloc 32, celui des « Nacht und Nebel » (« Nuit et Brouillard ») et des femmes utilisées comme cobayes par les nazis pour leurs expériences pseudo médicales. En septembre 1944, elle est affectée au bloc 11, la Kinderzimmer (« pouponnière »), où les nourrissons sont voués à une mort certaine. En mars 1945, elle est évacuée à Mauthausen, et libérée par la Croix Rouge le 22 avril 1945. Elle a vingt-deux ans quand elle regagne la France.
Après la guerre, elle reprend ses études et passe un doctorat d’État en psychologie infantile. Elle témoigne en 1950 lors du procès de l’ancien commandant du camp de Ravensbrück. Pendant la guerre d’Algérie, elle prend position contre la torture. Elle est alors présidente de l’Amicale de Ravensbrück.
De 1988 à 1991, elle participe aux travaux du Comité national consultatif pour les Sciences de la Vie et de la Santé, fondé par le professeur Jean Bernard, et milite pour l’adoption de la Convention internationale des droits de l’enfant.
En 1996, elle succède à Marie-Claude Vaillant-Couturier à la Présidence de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation. Très engagée dans la transmission de la mémoire de la Résistance et de la déportation, elle a régulièrement témoigné dans des établissements scolaires. Elle a publié ses souvenirs sous le titre Toute une vie de Résistance (2013).

CATHERINE ROUX, écrivaine et traductrice, a été arrêté au début de 1944 à 24 ans et déportée à Ravensbrück. Le poème choisi a pour thème la fouille d’entrée au camp. Son recueil de poèmes, Triangle rouge, a reçu le prix littéraire de la Résistance en 1968.

MICHELINE MAUREL (1916-2009) est une écrivaine et poétesse. Licenciée de lettres classiques puis professeur de lettres, elle entre dans la Résistance en 1940 et fait partie du réseau Marco Polo.
Le 19 juin 1943, arrêtée par la Gestapo, elle est internée au fort de Romainville. Le 29 août 1943, elle est déportée au Neubrandenbourg, annexe du camp de Ravensbrück, matricule 22410, et va y survivre durant 20 mois avant d’être libérée par l’avancée des troupes russes en avril 1945. En mai 1945, elle retourne vivre à Toulon. Des privations et sévices subis au camp, elle gardera toute sa vie les séquelles.
Après la guerre, elle occupe un poste dans l’enseignement de septembre 1946 à juin 1948, avant d’obtenir un emploi de traductrice à l’Organisation mondiale de la santé et au siège de la Croix-Rouge internationale à Genève. Parallèlement, à la fin des années 1950, elle se lance dans l’écriture et publiera plusieurs ouvrages : souvenirs des camps, contes pour enfants, poésies.