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Voix et visages – le Bulletin de l’ADIR

Le journal Voix et visages, Bulletin de l’ADIR, a été publié à raison de quatre à six numéros par an de 1946 (N° 1 de juin 1946) à 2005, année de la dissolution de l’ADIR (n° 295 de décembre 2005). Pendant toutes ces années, il a porté la voix des survivantes des camps et forteresses nazies qui ont fait le serment, à Ravensbrück, de témoigner, de s’entraider entre survivantes et de de se remémorer la fraternité des camps ainsi que la mémoire des camarades disparues. Un an après leur retour, ce bulletin contribue à tenir cette promesse.

Le titre de ce bulletin est expliqué en première page du premier numéro, dans l’article « Ce que sera le Bulletin » : « Voix des prisons qui sortaient des murs, des fentes des tuyaux, des grillages. Visages de toutes celles qui se sont retrouvées dans la grande aventure, visages émaciés de Ravensbrück que seul un prénom identifiait ». Autres objectifs du bulletin : « préserver cette fraternité des camps, si intense », « maintenir cet esprit de lutte et de résistance qui a été le nôtre » et « veiller à ce qu’il subsiste dans la bonne comme dans la mauvaise fortune ».

Voix et visages est accessible sur le site de La Contemporaine (ex Bibliothèque de documentation internationale contemporaine ou BDIC) :

Voix et visages – Années 1946 et s.

Le premier numéro de Voix et visages comporte, en première page, un merveilleux texte de Geneviève de Gaulle témoignant des difficultés du retour des déportées et internées :

Le retour

« Marcher librement, ne plus avoir peur, ni faim. Le premier bain, la première salade et ce doux soleil d’avril.

« Nous allions cependant comme en rêve. Où était cette joie inimaginable du retour ? Nous n’étions plus à la taille de cette joie, usées, limées comme des étoffes trop minces.

« Mais quoi ? Il a fallu vivre depuis. Ce n’était pas pour rire qu’on revenait de la souffrance et de la mort. Les salades, les bains, le soleil sont des rêves de captives. Il faut reprendre, à peine libres, les combats à bras le corps.

« Tant de détresse après ce premier choc du retour : les morts d’êtres chers, les foyers détruits, les maisons pillées, les santés atteintes. Et l’attente anxieuse de celles et ceux qui ne reviendront jamais.

« Le bonheur reste grave. Il y demeure présente toute la souffrance humaine. On n’oublie pas facilement la misère et la mort, ni la solidarité d’une épreuve commune.

« Mais nous n’avons pas été seules pour reprendre pied dans ce monde étonnant de la liberté. Un regard rencontré, une main serrée, quelques souvenirs retrouvés ensemble ; et voici que se tisse dans le présent comme dans le passé notre camaraderie. C’est notre force, comme en prison ou au camp, que cette amitié virile, efficace, totale. Nous avons besoin de la donner et de la recevoir pour être dignes de notre nouvelle tâche humaine. Nous avons maintenant la joie profonde et le réconfort de pouvoir dire, en pesant notre solidarité d’autrefois et celle d’aujourd’hui : ″mes camarades″ ».

Voix et visages – Année 1946

L’éditorial de Jacqueline Fleury, dernière présidente de l’ADIR, sur la couverture du dernier numéro de Voix et visages, témoigne des nouveaux défis de la mémoire de la déportation des résistantes : comment « maintenir les liens d’amitié auxquels nous tenons toutes tellement » et maintenir vivant le sacrifice de celles qui ont donné leur vie pour défendre leur pays de la barbarie nazie.